CUL DE SAC

Publié le 18 novembre 2019

Il n’est rien de plus désagréable que de s’apercevoir qu’on s’est engagé, heureux et confiant, sur une route barrée, et devoir faire marche arrière à petite vitesse pour se retrouver au point de départ, avec le sentiment d’avoir perdu son temps.

Cette mésaventure que nous avons souvent vécue semble aujourd’hui frapper la profession agricole dans sa majorité. Après avoir suivi les conseils des techniciens, des chimistes, des banquiers, des politiques et conseillers en tout genre, beaucoup se sont engouffrés dans la voie du progrès, des rendements et de la promesse d’un avenir doré.

Hélas, on s’aperçoit que les chimistes recherchaient leurs profits avant tout, comme les constructeurs de machines, et que les conseilleurs ne sont pas les payeurs. Après l’euphorie d’un développement industriel est venu le temps du doute, puis celui de la désillusion et de la colère.

Le grand public, qui se souvient encore d’une époque où ses aïeux étaient paysans, témoigne toujours d’une affection particulière pour ceux qui vivent du travail de la terre. Hélas, les paysans sont devenus des agriculteurs, puis des exploitants agricoles, et finalement des industriels du vivant. Et comme toute industrie, elle est confrontée à ses concurrents, et aujourd’hui à une baisse de la clientèle, mieux informée,  qui fait plus que s’interroger sur les graves conséquences sur sa santé de l’emploi des pesticides et des techniques mortifères.

Le marché de l’industrie agricole  conventionnelle chimique se rétrécit, et la tendance se confirme jour après jour au profit d’un marché paysan à l’ancienne. Ces producteurs ont en général compris, avant les autres, que la voie qu’on leur proposait conduisait à un cul de sac, complètement incompris et souvent méprisés par une majorité sûre d’elle-même et impatiente de s’enrichir grâce à la modernité.

 Certains agriculteurs ont pu se retrouver au fond du sac de façon volontaire en suivant toutes les directives qu’on leur avait données (et qu’ils auraient pu refuser). D’autres auraient aimer s’en sortir sans pouvoir le faire, victimes du système. Pire, beaucoup ont du se sentir coincés entre rester vertueux ou, à l’opposé, s’engager dans un processus agricole catastrophique pour l’environnement et l’être humain. Indépendamment de mauvaises considérations économiques  les concernant, on peut facilement imaginer que ce dilemme puisse conduire au suicide.

Mais de nombreux agriculteurs ont su trouver les bonnes voies du bio ou de l’agriculture raisonnée où on n’emploie les produits phytosanitaires que quand il y a besoin, un peu comme un médecin emploie un médicament pour traiter une maladie, au lieu de les utiliser systématiquement.

 

La réalité est cruelle et les manifestations musclées  sur la voie publique à l’aide de machines déjà obsolètes ne changeront rien à l’affaire. Pire, elles seront probablement contre- productives, car les démonstrations de force desservent leurs auteurs.

Maintenant, il est étrange de s’imaginer que la violence dans les rues soit une technique commerciale efficace pour renverser la tendance du marché. Car c’est toujours le choix  du public qui entraine le succès ou la faillite du fournisseur.

La règle d’or du succès est de donner satisfaction à sa clientèle, en toute circonstance. Dans les écoles de commerce, la première question que l’on pose aux étudiants est celle-ci : « Quelle est la personne la plus importante de l’entreprise ? » « Beuh ! le patron ?, le chef de production ?, le comptable ?, etc. » bredouillent les nouveaux étudiants en guise de réponse.

«  Non, c’est le client ! » répond le professeur.

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