INNOVATION ET INDUSTRIE
Publié le 10 octobre 2019
Dans le déclin industriel français, qui a vu pratiquement toutes nos industries manufacturières disparaitre au cours des 40 dernières années (sidérurgie, machines outils, machines agricoles, textile, chantiers navals, téléphonie, etc.) au point que la part de ce secteur d’activité est tombée de 40% à 10% dans le PIB, des voix autorisées appartenant à nos élites politiques annoncent que notre salut passe désormais par l’innovation.
Bon sang, mais c’est bien sûr ! Car, ne l’oubliez pas, cette injonction s’adresse au peuple français, déclaré peuple le plus intelligent de la terre.
On peut déjà se demander si nous n’aurions pas pu y penser plus tôt, ce qui aurait pu permettre de placer nos entreprises dans une meilleure position de concurrence en proposant des produits plus performants et moins chers.
Mais qu’à cela ne tienne, à cœur vaillant rien d’impossible ! Il n’est jamais trop tard pour bien faire, etc. On va voir ce qu’on va voir.
Mais l’innovation, qui est un processus créatif, souvent long et difficile, s’appuyant sur le réel existant, a besoin de ce support concret pour se développer. La pensée innovante procède d’abord par une connaissance approfondie des produits ou process industriels pour en identifier les insuffisances, complications inutiles ou dangereuses. Necessity is the mother of invention disent les Anglais avec justesse. Mais il ne suffit pas d’imaginer car il est indispensable de confronter l’imagination au réel, afin de valider l’innovation. Et ceux qui ont pratiqué ce genre d’exercice vous diront que le pourcentage d’idées innovantes qui arrivent à percer sont en minorité, car les raisons d’échec sont nombreuses : inadaptation notoire au plan technique, commercial, refus du changement, incompréhension du management de l’intérêt de l’innovation, etc.
Alors maintenant que le support industriel a disparu, on pourrait laisser libre cours à son imagination, comme nos élites politiques nous y encouragent. On peut en effet croire qu’il est plus facile d’innover avec un cerveau vide, qui permettrait l’éclosion spontanée de nouvelles idées. Hélas, le vide ne conduit à rien, et on peut facilement s’en convaincre en essayant soi-même d’inventer un nouvel objet dans un domaine où on ne possède aucune connaissance ou référence.
En somme, il faut être bien ignorant pour proposer de créer ex nihilo dans le désert, mais cela n’est pas étonnant : ceux qui nous parlent de notre salut par l’innovation n’ont probablement jamais rien inventé.
Ou plutôt si : ils ont inventé un slogan.